La woke culture : éveil utile ou prise de conscience futile ?

Article : La woke culture : éveil utile ou prise de conscience futile ?
Crédit: Micki J./creative Commons/Flickr
2 novembre 2021

La woke culture : éveil utile ou prise de conscience futile ?

N’en déplaise à une partie de ces crispés de la population totalement plongée dans l’invective contre les luttes de gauche, et à ceux de l’extrême droite décomplexée qui objectent la cancel culture, la woke culture a pris une ampleur sociétale exubérante dans un contexte où il règne cette situation impérieuse de mettre en lumière et de lutter contre les discriminations qui pèsent sur les groupes marginalisés: racisme, sexisme, xénophobie, homophobie.
La woke culture ou wokisme apparaît comme un mouvement d’actualisation, de constante mise à jour des luttes qui doivent être menées sans pause, ni frein.

Qu’est ce que c’est être woke?

Le terme anglo-américain  »woke » littéralement provient du participe passé du verbe anglais  »wake » qui signifie  »éveiller ». Il apparaît dans les années 1970 aux Etats Unis où il était utilisé par les afro-américains pour désigner le fait d’être conscient des inégalités raciales qui perdurent dans le pays. Le concept a été repris par une majorité de la population d’atlantique avec l’avènement du mouvement Black Lives Matter en 2013, pour se retrouver propulsé au cœur de mouvements qui prennent en compte non plus seulement des injustices raciales, mais également l’ensemble des discriminations que subissent certaines minorités.
Il y va ainsi d’une prise de conscience vive et continue nécessaire à contrer les systèmes d’oppression de toute sorte.

Fondements du mouvement woke

La pensée woke est née de cette multitude d’empoisonnements quotidiens demeurant sous silence, une manifestation à l’encontre de cette politique de l’autruche face à des actes répréhensibles pleinement récurrents qui passent pour ordinaires, légers et banals. Ainsi, elle se positionne en des militantismes engagés et lucides contre des systèmes muets et complices, qui occasionnent des inégalités et des différences de traitement. La pensée woke prend en compte les luttes feministes, anti-racistes, LGBT et climatiques. Elle s’oppose aux problèmatiques actuelles comme le privilège blanc (le fait d’être blanc apporterait des avantages socio-économiques dont on ne serait pas conscient dans la société), le racisme systémique ou d’Etat ( les discriminations raciales induites et soutenues par les systèmes en place) et le sexisme (la société qui fonctionnerait selon le schéma patriarcal).

Polémiques sur l’avancée du wokisme

Islamo-gauchisme, études de genre, écriture inclusive, intersectionnalité, sont autant de sujets prétendument portés par l’idéologie woke et qui soit disant infiltrés dans les universités et médias, s’useraient à compromettre la lucidité des étudiants, provoquant de vives réactions de l’opinion publique. En France, accusant la grille de lecture étasunienne incompatible avec les maux représentés ici, la pensée woke est vue comme une diversion réactionnaire d’une gauche déclinante qui s’éloignerait de sujets sociaux pour le sociétal. La woke culture s’est vue délégitimé par la couche de la population qui ne sent pas concernée par ceux que le journal Marianne qualifie d’obsédés du sexe, de la race et du genre, répandant leur prise de conscience qui ordonne et réduit à des slogans interprétés comme  »on est soit conscient, soit de connivence ». Et cette inexistence d’entre d’eux qui perturbe et oblige. Ceci sans compter une réforme des actions qui intime une censure, une plongée dans la bien-pensance et le politiquement correct qui refusent toute stigmatisation des groupes opprimées et promeut un penchant pour les luttes identitaires au lieu de l’universalisme. Il y a donc une accusation de division de la société engendrant des groupuscules victimaires dont le seul but serait de culpabiliser et diaboliser l’homme blanc hétéro, de fragmentation de la république au profit du communautarisme et de la non-mixité. Jean Michel Blanquer s’est exprimé au sujet de ce mot qui prend de plus en plus d’espace dans le débat politique en cette période de pré-campagne présidentielle:


« Je ne suis pas obsédé par le wokisme. Je suis simplement contre l’idée que l’on propose à notre jeunesse d’aborder la vie sociale en entrant dans une compétition de ressentiments. Elle attend l’exact contraire : ce qui rassemble, ce qui construit« , analyse le ministre.

Et il n’est malheureusement pas le seul à proposer une critique acerbe et mobiliser des contre-arguments pour faire régresser ce terme et lui faire perdre de sa validité :

« Le wokisme, fondamentalement c’est de faire de l’addition de vos frustrations, de vos discriminations ressenties au réelune forme de levier pour soutenir une politique. »  affirme sur CNews Jean-Baptiste Djebbari, le ministre des Transports

Woke culture : utile ou futile?

Bien entendu les détracteurs du mouvement nous laisse croire à une manipulation de la pensée, à la création d’une secte de puritains à la conscience morale ridiculeusement élevée, à une montée radicale de deconstructionnistes de la norme.

Bien qu’etant jugé comme mot fourre-tout qui englobe des luttes déjà prises en compte sans qu’on ait besoin de trop revenir sur ces questions, la perpétuelle récidives de certains signes alarmants montrent bien qu’on est encore loin d’évoluer dans une société juste et égalitaire. Notamment avec le taux de feminicides qui ne cesse d’accroître, les victimes d’actes homophobes, le rejet des migrants, les violences policières anti-noirs. Dès lors il serait plus que raisonnable d’être en alerte et ne pas se laisser berner par une fausse considération ponctuelle de maux qui grignotent lentement notre société avec l’accord tacite de personnes malveillantes. Il faudrait être actif et laisser place à un esprit critique et objectif. Stay woke!

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